Shall we dance....in Hell?

Mes amis, j'espère que vous êtes prêts.   Car je m'en vais vous narrer mon voyage au fin fond des Enfers. 

J'ai toujours de brillantes idées.  Idées qui ne sont brillantes que lors de l'énoncé.  Je dois avoir le mauvais oeil, ou un truc du genre, parce qu'à chaque fois que je dis "tiens, et si je faisais ....(insérer l'idée de votre choix)....?, ça se solde par un désastre.  Bon, j'ai perhaps une légère propension à l'exagération, mais mes bonnes idées sont rarement de bonnes idées au final.  Par exemple, quand je fais du vélo le samedi matin, il est garanti que si je dis "tiens, si on prenait ce chemin là, pour voir?", on se retrouve illico à travers champs, faire un détour de 12 km pour se retrouver exactement là où on était, ou en train de tenter l'ascension de l'Everest Picard.  (Cela dit, ma collèguesse de pédale n'est pas mieux non plus, elle nous envoie systématiquement dans la jungle Picarde, redoutable, c'est bien connu). 

Et donc, au mois de septembre, mois de bonnes résolutions juste après janvier, j'ai eu une bonne idée.  J'allais arrêter l'escrime, et faire de la danse à la place.  Il faut savoir que j'ai eu une enfance difficile et traumatisante, avec un père tyrannique qui m'a refusé le tutu, et donc que ceci était un moyen surmonter un traumatisme d'enfance.  Et aussi, j'ai toujours voulu danser des trucs genre swing, le vrai bon rock de derrière les fagots, charleston, claquettes, etc. 

Me voilà donc à la recherche  d'un cours de rock (puisqu'il fait faire un choix), dans les environs de Compiègne.  Je constate très vite que les écoles de danse à Compiègne sont 1. chères, 2. les patronnes sont d'une amabilité aussi légendaire que celle des geolières, 3. prétentieuses, et qu'en plus, la grande majorité ne fait pas de cours de rock.  Je suis contrariée dans mon élan, frustrée.  Et là, deuxième idée lumineuse.  Je vais appeler l'école de danse de la petite ville à côté de mon village.  J'appelle donc. 

La personne au téléphone a l'air très sympa, me dit qu'il n'y a pas de cours de rock proprement dit, il y a un cours de diverses danses dont le rock.  Méfiante, tout de même, j'essaie de tourner poliment et proprement la question suivante : "c'est pas un groupe de vieux pour danse de salles des fêtes de village, hein?".  Il me semble réussir à formuler ça correctement, puisque la personne me dit "c'est un groupe très sympa, avec des gens de tous les âges.  Et au passage, elle m'apprend également qu'il y a le samedi matin, juste après ce cours, un cours de lindy hop.  Le lindy hop, c'est l'ancêtre du rock, avec une base de charleston aussi, c'est en gros tout à fait ce que je veux.  Seulement, il n'y a pas beaucoup de gens dans ce cours (parce que les gens sont des moutons qui veulent tous faire du modern jazz), donc il y a de fortes chances qu'il soit arrêté dans les 3 semaines à venir.  Mais la nana me dit que j'ai droit à une séance d'essai, donc pourquoi je ne viendrais pas le samedi suivant, faire les 2 cours d'affilée, et voir ce que j'en pense?  Ce qui me paraît somme toute, une fort bonne idée.  Rien que là, j'aurais du me dire "ça fait 3 brillantes idées que tu as en peu de temps, méfiance".  Ben non.  Même la perspective de commencer la danse avec 2h45 de danses en tous genres + 1h45 de lindy hop ne me paraît pas une idée totalement irréaliste pour une grande sportive telle que moi. 

Le samedi suivant, munie de mes salomés ravissantes, et accompagnée de ma colleguesse de pédale qui veut venir rigoler un coup, je me présente à cette école.  C'est un entrepot dans une zone industrielle, d'où s'échappent d'harmonieux couinements d'accordéon.  Toute personne dotée d'un minimum de bon sens se serait enfuie.  Moi, non.  Je me dis qu'on ne peut rien juger sans avoir testé, et pis c'est pas mon cours d'abord, c'est la fin de celui d'avant.  Qui est, apprend-je, le même cours que le mien, mais pour les niveaux avancés.  Je ne me laisse pas démonter et ne fais même pas le lien.  Ma colléguesse de pédale s'installe dans un coin pour mater, et je vais enfiler mes salomés. 

Je rentre sur la piste.  A l'aise, vous imaginez.  Y'a plein de gens que j'connais po.  Il y a quelques jeunes en effet, mais ils ne sont pas légion.  Bref.  je suis forte, à l'aise, je peux le faire.  La prof est une petite chose bariolée aux cheveux jaunes et moutonnants, pas toute jeune, mais souriante.  Et c'est parti pour 2h45 de folie. 

La petite chose bariolée a un micro qui siffle mais ne transmet pas la voix.  Nous comprenons cependant que nous allons commencer par nous tenir la main 2 par 2, et marcher à travers la salle au son de la musique.  Elle envoie la sauce.  A fond.  Je ne sais pas ce que c'est, mais je fais un bond de 2 mètres tellement c'est fort, je tiens une main moite, la musique est ignoble.  J'apprend plus tard que c'est du Yannick Noah.  Ca dit "Ose", tout le temps.  Je me répète fermement  "nan, mais c'est pas grave, faut souffrir pour être belle, ça va être bien après, ils vont changer la musique, etc".  On enchaîne sur une lambada.  Bon, ça, je sais faire.  Plusieurs vieux beaux de salle des fêtes de nos campagnes se ruent alors sur la chair fraîche, c'est-à-dire moi (j'ai toujours plu à ce profil de mec, exactement ce que je recherche en plus, ça tombe bien).  Vous battez pas les gars, y'en aura pour tout le monde, on est obligés de changer de partenaire toutes les 2 minutes, et la petite chose bariolée nous remet la musique plusieurs fois.  Pour être sûre que personne ne soit lesé et privé de se frotter contre moi.  Je suis à l'agonie.  Du coin de l'oeil, je vois ma copine en train de se rouler par terre dans son coin en me regardant.  Je la hais.  En plus, elle part quelques minutes après, parce qu'elle était juste venue regarder, avant d'aller vivre une vie normale.  Je déteste qu'on me touche. Comment avais-je pu oublier ce détail?  La petite chose bariolée passe derrière moi et dit "détendez-vous, vous êtes toute crispée, bassin contre bassin, cuisse contre cuisse".  C'est sûre, ça me détend à mort, d'avoir un bassin étranger collé au mien.  "Rapprochez-vous", qu'elle dit encore.  J'envisage de lui en coller une, et ensuite d'être obligée d'épouser le mec, vu comment il me colle, j'ai perdu ma vertu.

On enchaîne sur de la salsa, de la samba, il y a plus de femmes que d'hommes, il faut danser entre femmes souvent.  Mais pas moi.  J'ai la chance d'être la cible number one.  J'apprend au fil du cours que le groupe de débutants est composé à 80% de gens d'une cinquantaine d'années, qui font ce cours depuis 4 ans (on peut rester débutant pendant 4 ans!?), qui s'entendent hyper bien et font tous les bals de la région (je veux mourir), fort sympas au demeurant mais je ne me sens pas involved, là, tout de suite.  Ainsi que de 4 couples qui vont se marier et donc ne veulent pas se mettre la honte en public le jour J.  Donc des gens de mon âge, mais qui restent ensemble, évidemment.  Et y'a une autre fille, toute seule, comme moi.  Qui s'éclate à mort.  Elle est gentille, mais on n'est visiblement pas sur la même longueur d'ondes.  La chaleur monte dans cet entrepot, les mâles collés contre moi sont de plus en plus suants, c'est ignoble.  J'implore le ciel pour une catastrophe nucléaire, un tremblement de terre, n'importe quoi.  Rien. 

Au moment où je commence à me résigner, me dire "in for a penny, in for a pound ", que de toutes façons, ça peut pas être pire, et bien je constate qu'une fois de plus, j'ai tort.  On attaque la polka, sur fond sonore accordéonesque.  La polka, ça tue.  Je pense que ça doit être encore plus efficace que de courrir, en matière d'effort physique.  On enchaîne sur la polka piquée, c'est encore plus tuant.  Le degré d'humidité odorante de la salle monte encore, mes tympans sont morts, mes pieds aussi, ma fin est proche.

Dieu merci, la fin du cours est proche aussi.  La petite chose bariolée en remet une couche en nous invitant au bal la semaine prochaine,et en disant "vous voyez, on n'a pas besoin de pause, ça passe tout seul".  Mouais.  J'apprend alors que le cours suivant, celui pour lequel j'ai subi tout ça, le lindy hop, sera composé d'exactement les mêmes personnes, qui ont donc sué 2h45 avant dans mon nez.  Je fais sonner mon portable, il y a un mort chez moi, non plusieurs, mon chat a laissé un truc sur le gaz, et ensuite a vomi sur le canapé, il faut que je parte.  Je suis vraiment déçue, j'aurais tellement voulu rester encore presque 2h, mais je dois y aller.  En courant.  Je ne me change même pas, je cours jusque ma voiture.  J'allume 18 clopes en même temps, songe à me faire interner d'urgence, je dois rentrer chez moi.   VIIIIIIITE!  On ne sait jamais, mes vieux beaux de la salle des fêtes suants pourraient venir me récupérer sur le parking.

Moralité de l'histoire, il faut que j'apprenne à ne JAMAIS m'écouter.  Je reprend le vélo, noble sport dans la nature et l'air frais, où personne ne vous touche, le samedi matin, sous l'oeil goguenard de ma colleguesse de pédale.  Je n'essaierai plus de prendre de revanche sur le destin de mon enfance.  Vais d'ailleurs annuler ma souscription au club Barbie de ce pas.  Et enfin, last but not least , je sais désormais danser la polka piquée.  Might come in handy some day, one never knows. 

Info inutile du jour : Il y a écrit YKK sur les fermetures éclairs des Levi's, et ben ce sont les initiales de Mr Yoshida Kogyo Kabushibibaisha, le plus grand fabricant de zips du Monde.  Ca vous épate, hein?

Musique en cours :  David Vendetta - Love to love you baby         

Comments

[Charisma]

Swinguette, bienvenue, et oui, je SAIS que le swing c'est génial, quand c'est pas fait par des beaufs aux goûts musicaux atroces, c'est précisément ce que je voulais......mais il semblerait qu'il n'y ait pas de danses PAS beaufs dans ma verte campagne.......


bouhouhouhou!!!!

[Swinguette49]

Comme c'est dommage que vous n'ayez pas tenté le swing.... c'est super génial (j'en fait depuis 3 ans)et cela n'a absolument rien à voir avec les autres danses que vous décrivez.

Si ca vous intéresse je peux vous donner des bons liens de site de swing...

A bientôt... retentez dans un "bon" cours vous verrez que l'esprit des swingueurs est génial... ce sont de grands moments à partager sur des musiques magnifiques : Ella Fidgerald, Duke Ellington, Ray Charles.... Big bas Vodoo Dady....etc .....

Swinguette49